Féminisme à Hyères : Décollage immédiat

Des slogans féministes se sont invités sur les murs de notre cité dans la nuit du 1er au 2 avril dernier.

Ce soir-là, dans toute la ville d'Hyères, des affiches ont fleuri dans l'espace public pour dénoncer, grâce à des messages courts et percutants, les violences faites aux femmes.


Patchwork des affiches collées dans Hyères

L'action, parfaitement organisée, n'aura duré en tout et pour tout qu'une heure et demie : dix-sept personnes de 20 à 65 ans (dont 14 femmes) réparties en 5 groupes et « armées » d'affiches, de pinceaux et de pots de colle, ont méthodiquement quadrillé  la commune, à partir de 21 heures ; collant en quelques minutes leurs slogans militants sur les murs des bâtiments publics, de Giens jusqu'à  l'Ayguade, en passant par la gare ou bien encore le centre-ville.


Avenue Clotis

Place Clémenceau


Rue Yann PIAT


Front de mer à l'Ayguade


Square Gabriel Péri

Ce n'était d'ailleurs pas un coup d'essai pour ce groupe local féministe qui s’était déjà illustré en 2020 en rebaptisant certaines de nos rues du nom de femmes célèbres.


Article du 1er juillet 2020

Pour ces militantes, il ne s’agit en aucun cas d’une provocation mais bien d’un des moyens de communication utilisés par cette 4ème vague féministe, pour parvenir à faire changer les mentalités, sans arme, ni haine, ni violence.
En France, une femme meurt tous les 3 jours sous les coups d'un mari, d'un conjoint ou d'un ex compagnon violent et il est donc important, comme le rappelait la journaliste, romancière et militante féministe Benoîte GROULT, de ne pas se tromper de combat car « le féminisme n’a jamais tué personne, le machisme tue tous les jours ».

Souvenons-nous également que l'histoire du féminisme s'est écrite en grande partie sur les murs de nos cités et cette campagne d'affichage éphémère s'inscrit parfaitement dans cette lignée. Ce n'est pas non plus un cas isolé en France puisqu'on observe des collages similaires qui s'organisent partout dans l'hexagone afin de sensibiliser l'opinion publique sur les violences faites aux femmes, sur les enfants co-victimes et sur les féminicides. Comme par exemple  à Montreuil où la municipalité permet aux associations féministes locales de pouvoir s'exprimer librement en s'appropriant certains murs de la ville.

Mais il semblerait bien qu'à Hyères, la journée internationale des droits de la Femme, ce soit uniquement le 8 mars...

Car, contrairement à Montreuil, le sort de ces affiches en a été jeté à Hyères (au sens propre comme au sens figuré) dès le lendemain matin où leur décollage fut immédiat sans même avoir besoin d'attacher sa ceinture, ni relever sa tablette. Un comble dans une commune aeroportuaire...

Et, une fois les affiches décollées à grands renforts de nettoyeurs haute pression réquisitionnés pour l’occasion, les tags masqués pendant quelques heures ont alors enfin pu reprendre leurs droits.

Comme ici à Giens où, après que les services municipaux aient karcherisé l'affiche « les fleurs n'effacent pas les coups », on pouvait à nouveau lire sur ce mur, « i turisti fora », ce qui en corse peut approximativement se traduire par « les touristes dehors ».

Ce message serait-il donc plus « politiquement correct » que le slogan féministe enlevé en toute hâte ?


A Giens


Le mur arbanais, une fois « nettoyé »

Ce qui pose une vraie question de fond : pourquoi donc un tel empressement à faire disparaître toutes ces affiches ?

Cette censure municipale est d'autant plus étonnante que la lutte contre les violences faites aux femmes est une des grandes causes nationales du deuxième quinquennat MACRON, et d’autant moins compréhensible que ce mode d’affichage (légal au demeurant) est par définition éphémère et biodégradable ; c'est bien connu, la nature et le béton finissant toujours par reprendre leurs droits…

Se pourrait-il que ce soit la peur de voir débarquer maintenant à Hyères le mouvement féministe #balancetonporc qui ait précipité cette décision de décollage ? La crainte peut-être de voir ainsi se libérer la parole des femmes hyéroises ?

Ce n’était pourtant que du papier, de la colle et un peu d’encre…



D'ailleurs, en parlant de papier, il est également assez surprenant (ou peut-être pas finalement) que, malgré une actualité assez terne cette semaine là, l'agence locale du journal Var Matin n'ait pas souhaité en faire un, justement, de papier sur ce sujet des colleuses hyéroises, malgré le communiqué de presse et les photos que des membres de ce collectif leur avaient pourtant bien fait parvenir. Pas inspirés par le sujet, sans doute...

En tout cas, le contribuable hyérois appréciera certainement qu'on ait réquisitionné si rapidement autant de balayeuses (qui font pourtant apparemment cruellement défaut dans d'autres secteurs de la ville) pour faire disparaître à grands coups de jets haute pression ces messages « subversifs ». Ou bien encore qu'on ait pu trouver non pas un mais bien deux véhicules de police municipale pour aller contrôler l'identité de ces « délinquants » qui collaient leurs affiches sur le pont de l'autoroute, à une heure où il n'y a, la plupart du temps, qu'un seul véhicule pour patrouiller dans toute la ville. Tout est question de priorités, finalement...

A Hyères, le chemin semble encore long pour faire changer les mentalités. Mais on peut compter sur les initiatives de ce groupe local militant pour continuer à faire parler d'Elles.

Car au pays adoptif de Benoîte GROULT, il ferait BEAUVOIR qu'on ne puisse pas « oser le féminisme ».

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