Mourad BOUDJELLAL reprendra-t-il le HTV ?

Les récentes déclarations de Mourad BOUDJELLAL dans le journal Var-Matin (édition « Métropole Toulonnaise » du 16 décembre 2020) sur son projet de création d’une structure omnisports incluant le Hyères Football Club et le Hyères Toulon Var Basket, sont pour nous l’occasion de revenir sur l’histoire mouvementée du club local de basket ball.

Créé en 1990 de la fusion du Club Sportif Toulonnais et de l’Omni Sport Hyérois, le HTV alternera tout au long de son histoire des moments de gloire (notamment lors de ses montées en pro A en 2001 puis en 2017) et de nombreux revers de fortune visiblement dus à une gestion calamiteuse et des problèmes financiers à répétition.


Difficile de parler de l’histoire de ce club sans évoquer tout d’abord les élections législatives de 1993, qui opposaient Joseph SERCIA, président de l’époque du HTV, à Yann PIAT, dans la 3ème circonscription du Var.

Constats d’huissier à l’appui, la candidate accusait en effet le président du HTV de détourner les moyens financiers du club de basket pour s’offrir une campagne promotionnelle d’affichage à la gloire du « candidat-président du HTV » ; sachant qu’il était également le vice-président de l’assemblée départementale qui faisait voter depuis 1991 une augmentation annuelle de 500.000 francs (76.000 €) de la subvention au club.


Joseph SERCIA, le « candidat-président du HTV »

Dans le jargon judiciaire, on appelle ça une ingérence flagrante et de l’abus de biens sociaux. C’est du moins ce qu’affirme le journaliste Alain CARION dans son livre « Opérations Mains Sales » aux éditions « Première Ligne ».

Le club sera également éclaboussé par les démêlés judiciaires d’un de ses membres fondateurs. Son directeur général, Philippe LEGNAME, également membre du comité directeur de la Fédération Française de Basket Ball (FFBB), sera en effet condamné en 2009 par le Tribunal Correctionnel de Toulon à douze mois de prison avec sursis et une amende de 5 000 € pour prise illégale d'intérêts, faux et usage de faux ainsi que détournement de fonds sur des salaires versés indûment à son épouse ainsi qu'à Jean-Louis BORG, entraîneur du club à l'époque des faits.


Philippe LEGNAME, le Directeur Général du HTV jusqu'en 2018

Ce qui n’empêchera pourtant pas Philippe LEGNAME de continuer à siéger au HTV, d’être élu Vice-Président de la FFBB et même de devenir, en 2012, le Président de la Ligue Féminine de Basket professionnel.

Le milieu du basket ball français semble avoir la mémoire courte

En 2010, le club passera très près de la rétrogradation, toujours en raison de problèmes financiers récurrents avec un passif de près de 750.000 € puis, en 2013, il sera, placé, comme il fallait  s’y attendre, en redressement judiciaire par le Tribunal de Commerce de Toulon.

En 2017, le club est alors Dribblé de dettes (près de 1.000.000 €) et modifiera ses statuts pour se transformer en Société Anonyme Sportive Professionnelle (SASP), lui permettant ainsi d’ouvrir son capital aux investisseurs.

On parle alors d’une action à 75 €.

Mais, contrairement aux déclarations parues à l’époque dans les journaux, l’ouverture du capital n’aura jamais lieu…


Extrait du journal Var-Matin du 22 avril 2017

Et les responsables de ce club, qui évoluait alors en Pro B, décideront finalement, en comité restreint, de revendre les droits sportifs du HTV au club Paris Basket Ball, afin d’éviter la liquidation judiciaire.

Cette cession s’est faite suite à l’avis favorable du Tribunal de Commerce de Toulon et, surtout, de la FFBB où, faut-il le rappeler, siège toujours l’influent Philippe LEGNAME.
Et c’est cette même FFBB qui demandera ensuite pudiquement à Philippe LEGNAME, pressenti pour devenir le nouveau Directeur Général du club parisien, d’abandonner ses fonctions de vice-président de la FFBB.

En 2018, le club hyérois est donc rétrogradé en Nationale 3, la 5ème division du basket ball, tandis que Paris évoluera désormais en Pro B grâce aux droits sportifs rachetés au HTV.

Vive le sport !!!


Visiblement écartés de cette décision de cession des droits sportifs, nos élus locaux, Messieurs GIRAUD, GIRAN et FALCO, se sont finalement réveillés, suite à l’annonce dans les journaux de la rétrogradation du club ; poussant alors des cris d’orfraie, criant au scandale et menaçant haut et fort de déposer plainte.

Il est vrai qu’avec 78% de subventions publiques dans son budget (contre 21 % en moyenne pour la Pro A), le HTV était le club du championnat professionnel qui dépendait le plus des finances publiques.

Nos généreux élus auraient donc dû logiquement avoir leur mot à dire sur ce rachat lors de cette assemblée générale qui s’est tenue dans la plus grande confidentialité et où, dindons de la farce, ils n’étaient même pas invités

Pour autant, ces vieux briscards de la politique pouvaient-ils vraiment ignorer la situation financière catastrophique de ce club et les petits « écarts » de ses dirigeants depuis près de 30 ans ?
Cela semble peu vraisemblable, notamment parce que les demandes de subventions des clubs et des associations, doivent toujours être accompagnées d’un rapport financier et des procès-verbaux d’assemblées générales.
Il parait donc non seulement évident qu’ils connaissaient parfaitement la situation financière du club mais ils sont même allés, par le passé, jusqu’à multiplier les artifices financiers afin d’augmenter les subventions du club en difficulté et de le maintenir ainsi sous perfusion des deniers publics.

On peut citer pour exemple cette convention de partenariat entre la ville et le club pour des actions (plus ou moins réalisées d'ailleurs) d’animation, d’éducation et de prévention de la violence en présence de joueurs : 90 à 100.000 € sous la municipalité « POLITI » et jusqu’à 208.000 € par an sous la municipalité « GIRAN ».

Le panier à trois points semble même avoir été marqué par le club lors de la signature d’une convention complémentaire pour faire figurer le logo de la ville sur les maillots des joueurs. Pourtant la commune a toujours été un des principaux sponsors du club et aurait donc du déjà logiquement figurer sur les maillots, sans bourse délier.

Cette petite astuce coûtera tout de même pendant des années au contribuable hyérois entre 30.000 et 65.000 € par an.

En conclusion, Messieurs Hubert FALCO, Marc GIRAUD et Jean-Pierre GIRAN auront sans doute préféré fermer les yeux, éblouis par les lumières du palais des sports lorsque le HTV gagnait encore...


Le HTV à la « belle époque » de la concorde républicaine

Un nouveau volet judiciaire semble s’ouvrir le 25 juin 2018 lorsque le maire, questionné lors du conseil municipal par l’opposition sur la situation du club, évoque « des sommes considérables versées depuis plusieurs années par l’association à la société SASP HTVB au titre de remboursement d’une dette que les dirigeants du club n’ont pas été capables de justifier ».

Jean-Pierre GIRAN affirmera alors avoir transmis le dossier au Procureur de la République et à la Chambre régionale des comptes et déclarera également envisager de déposer plainte.


Extrait du journal Var-Matin du 25 juin 2018

Deux ans plus tard, qu’est-il donc advenu de cette plainte ?

Elle n’aura probablement jamais été déposée, tant il est compliqué pour le maire d'incriminer l'ancien manager du HTV sans révéler au grand jour son propre laxisme dans ce dossier...

Une nouvelle équipe ?

Suite à la rétrogradation du club en Nationale 3, Hubert FALCO tentera bien, lors de l'assemblée générale de 2018, de rassurer les adhérents en saluant «  une nouvelle équipe » dirigeante.

Mais les observateurs avertis avaient quant à eux, plutôt le sentiment que les héritiers du système LEGNAME étaient toujours aux commandes du HTV.

Certes, le nouveau président du HTV, Gérard GRASSER, n’est pas un homme du sérail. C’est un homme discret, rêvant sans doute pour le club à une gestion de bon père de famille.

Mais le nouveau directeur sportif, William DUMAS, qui prend la suite de Philippe LEGNAME, peut en revanche être qualifié de « pur produit » du club. Fils de l’entraîneur Yves DUMAS, il joue en effet dans le club hyérois depuis qu’il est benjamin et il sera même le meneur de jeu de l’équipe pro de 1992 à 1999.
Une fois sa carrière  sportive achevée, il deviendra en 2011 le patron du bar-restaurant «  Mojito Café », sur le port d’Hyères où joueurs et entraîneurs auront bientôt leurs habitudes. Selon le journal Var-Matin (édition du 18 août 2018), il est d’ailleurs toujours resté proche du club, dont il sera même un des partenaires pendant plusieurs saisons.


William DUMAS, nouveau directeur sportif du club

Et, à l'instar de son mentor, Philippe LEGNAME qui rémunérait au sein du club son épouse et son fils (qui fut successivement joueur, entraîneur adjoint, entraîneur puis responsable des relations presse/média), William DUMAS souhaitera naturellement, lors de sa prise de fonction, s’entourer de son épouse, Aurélie, pour l’aider dans sa nouvelle gestion du club.

Dans ces conditions, peut-on réellement s'étonner que le HTV « nouvelle version » ait rapidement pris quelques libertés avec les statuts associatifs du club ?
Le respect des délais de convocation aux assemblées générales, la communication préalable de l’ordre du jour dans les convocations et, surtout, la diffusion des procès verbaux d’assemblées générales aux adhérents ne semblent pas vraiment être le fort de la nouvelle équipe, c’est le moins que l’on puisse dire !!!

Il est même très difficile pour les adhérents de savoir si les assemblées générales 2019 et 2020 ont bien eu lieu tant l’administration du « nouveau » club semble être restée opaque.

Qu'en est-il aujourd’hui de la dette de ce club en redressement judiciaire jusqu’en 2023 ?
Quelle est sa nouvelle masse salariale ?
Quel est le salaire de tous les joueurs professionnels recrutés ces deux dernières années au sein de ce club au statut pourtant amateur ?
Et combien sont rémunérés les nouveaux dirigeants ?

Ce sont autant de questions simples que les adhérents du club et les contribuables hyérois sont légitimement en droit de se poser et auxquelles il est pourtant très difficile actuellement d’obtenir de réponses.

Quant à nos élus, censés siéger depuis 2018 au conseil d’administration du club, il y a fort à parier qu’ils se comporteront comme ils l’ont fait précédemment avec Philippe LEGNAME et fermeront les yeux sur les éventuelles incartades du nouveau directeur sportif ; tant ses liens nous paraissent étroits avec l’actuelle municipalité.

Oubliant par exemple que le code électoral interdisait à toute association d’apporter son soutien à un candidat, William DUMAS n’était-il pas en effet membre du comité de soutien de Jean-Pierre GIRAN pendant la dernière campagne municipale, n’hésitant pas à se présenter sur la profession de foi du candidat comme un « manager sportif de basket » ?
Et, sans doute grâce à un rebond favorable dans le dernier quart-temps, son épouse, Aurélie, ne vient-elle pas d’être embauchée en mairie, dans la dream team municipale ?

Dans ce contexte, Mourad BOUDJELLAL pourra-t-il réellement être le repreneur providentiel de ce sympathique club familial ?
A la rédaction du Gabian Déchaîné, nous en doutons sérieusement car nous sommes intimement convaincus que ce n'est pas d'un businessman, aussi compétent et talentueux soit-il, dont le HTV a besoin mais plutôt d'un magicien pour redresser ce club dont la spécialité n’est finalement pas le jeu de passe mais plutôt les tours de passe-passe.... du moins en terme de trésorerie !!!!





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