Kaïna Beach : un petit air de « Côté Mer »

Outre le fait d’être deux restaurants de plage hyérois qui ont marqué les étés de la jeunesse locale, savez-vous qu'on dénombre au moins 6 points communs entre « Côté Mer » et le « Kaïna Beach » ?

Premier point commun : des lots de plage... pas comme les autres

Ces deux restaurants ne relèvent pas de la compétence métropolitaine, contrairement aux autres établissements de plage hyérois, mais directement de la commune. Ce sont également les seuls qui ne sont pas soumis à un démontage hivernal et peuvent donc être exploités toute l’année : week-ends, jours fériés et vacances scolaires.

Deuxième point commun : quand le succès attire les convoitises

Tout comme « Côté Mer » où le mannequin Marc LE ROY a rendu ses lettres de noblesse à la plage sablonneuse en face de l’aéroport, le Kaïna Beach n’intéressait personne jusqu’à ce que Pierre et Alex, les deux copains d’enfance du Fenouillet, se retroussent les manches et fassent prospérer l’affaire ; arrivant à concilier plage familiale la journée et lieu festif incontournable la nuit. Désormais, leur chiffre d’affaires à 7 chiffres intéresse certains investisseurs locaux 2.0 bien connus et pourrait éventuellement encourager certains jeux d’influence…

Troisième point commun : des candidatures loufoques

Le Kaïna Beach, à l’instar de « Côté Mer », a vu les délégataires sortants se faire griller la politesse par des candidats tout droit sortis du chapeau, aux profils pour le moins atypiques.

En 2014, Léa URSINI (société ULTIMO) avait raflé la mise face à Marc LE ROY avec un projet délirant où l’imitateur Laurent GERRA était censé, dans le dossier de candidature de la fille de « Monsieur Paul », venir animer tout l’été des dîners-spectacles sur la plage. Crédule, la commune avait applaudi puis signé des deux mains…

En 2024, le dirigeant de la société « les Voiles d’or » à qui la commune a attribué le lot de plage du Kaïna Beach est… directeur des systèmes d’information à la mairie de Cavalaire-sur-Mer. Pas vraiment l’expérience requise pour obtenir un restaurant de plage dans le cadre d’une Délégation de Service Public (DSP), mais pas de quoi alarmer pour autant la commune, puisque, c’est bien connu, des serveurs informatiques aux serveurs en salle, il n’y a qu’un pas…

Quatrième point commun : des garanties bancaires pour le moins légères

Se sentant probablement déjà en terrain conquis, Léa URSINI n’avait pas cru bon de peaufiner son dossier pour décrocher le lot de plage « Côté Mer » : aucune garantie financière sérieuse, des documents griffonnés au crayon à papier et seulement 30 000 € d’apport grâce à un prêt consenti par son parrain, le chanteur baroudeur Bernard LAVILLIERS. Cette candidature bancale ne l’avait pourtant pas empêchée d’emporter l’adhésion de la commune.

Lorsque Léa URSINI fut déboutée (de manière assez cinglante) par le Tribunal Administratif de Toulon, ce fut au tour de Marie MAESTRACCI-BARBIERI (société « Le Petit Bain ») de postuler. Afin de l’aider dans ses démarches administratives, c’est notre philanthrope de maire, Jean-Pierre GIRAN himself, qui joua les entremetteurs entre un banquier de ses connaissances et la belle restauratrice corse (lire ici) afin de lui faire obtenir les 30 000 € de caution réclamés par la commune.

En tout bain, tout honneur, cela va sans dire…

Des garanties financières pour le moins fantaisistes qu’on retrouve aujourd’hui également dans le dossier de candidature de la société « les Voiles d’Or » qui indique un montant total d’investissements de 475 000 € HT sans produire aucun engagement bancaire, ni aucun justificatif de prêt pour un tel montant.

Quant à l’associée du directeur de service de Cavalaire-sur-mer, elle est certes issue du milieu de la restauration et peut donc justifier, contrairement à son associé, de l’expérience nécessaire pour obtenir le lot de plage du Kaïna Beach, mais elle n’a pas jugé utile de signer les statuts de la société, la lettre de candidature et n’a pas fourni non plus de preuves de sa participation financière au capital de la société (5% apparemment). De la négligence, sans doute ? Heureusement que la commune, dans sa grande mansuétude, a fermé les yeux sur ces petits détails administratifs.

Cinquième point commun : des camouflets juridiques à répétition

Ces deux affaires se sont en effet soldées devant les tribunaux par des échecs cuisants pour la commune, une véritable déculottée juridique pourrait-on dire : des procédures bâclées, des dossiers mal ficelés, bref une vraie masterclass d’incompétence…


Article Var Matin du 31 octobre 2024

On ne va pas revenir une énième fois sur les multiples rebondissements judiciaires du restaurant « Côté Mer » qui défrayent la chronique depuis plus de 10 ans.

Mais il est intéressant de constater qu’au Kaïna Beach, le juge des référés puis le conseil d’État ont tous deux fustigé la procédure de passation de ce marché public.

Morceaux choisis :

  • « La commune a méconnu les exigences à caractère impératif de son règlement de consultation »,

  • « Les documents justificatifs présentés étaient insuffisants et ne répondaient pas aux exigences du règlement de la consultation »,

  • « Les capacités de la société ont été incorrectement appréciées ».

Sur les trois candidatures retenues par la commune, seule celle arrivée en troisième et dernière position (la société SMDR) était donc recevable, selon les jugements rendus.

À titre de comparaison, on est quasiment au niveau d’incompétence du marché public du centre commercial du nautisme épinglé récemment par la chambre régionale des comptes (lire ici).

Sixième point commun : des rancunes bien ancrées

Pierre, un des 2 co-gérants de la société SMDR évincée de l’appel d’offres, n’est pas vraiment un inconnu dans le milieu de la restauration : à la tête aujourd’hui de plusieurs établissements dans l'aire toulonnaise, il fut directeur du restaurant « Côté Mer » avant de prendre la barre du Kaïna Beach. Quand on connaît l’animosité légendaire de notre « petit pépère du peuple » envers « Côté Mer » et quand on voit toute l’énergie déployée par la commune jusqu’en Conseil d’Etat (alors que toute autre commune moins entêtée que la nôtre aurait sans doute arrêté les frais bien avant), cette histoire ne pourrait-elle pas cacher finalement une sorte de Vendetta ?

Toutefois, au delà de ces 6 points communs (on pourrait d’ailleurs en trouver bien d’autres…), l’annulation de la procédure de passation de la délégation de service public du Kaïna Beach, soulève également de nombreuses questions…

Quand GIRAN joue les Ponce Pilate

Dans ce dossier, non seulement la commune a failli à (presque) toutes ses obligations en matière de commande publique mais elle s’est même fait aider pour cela par un cabinet de conseil externe. Cet Assistant à Maîtrise d’Ouvrage (AMO) avait pour mission de l'épauler dans la passation du contrat de concession de plage, ansi que dans « l’analyse des candidatures et des offres, les négociations avec les candidats, le choix du titulaire et l’attribution du contrat ».

Habituellement, les collectivités ont recours à ce type de prestation externe lorsque la technicité du marché l'exige ou bien encore pour se « couvrir » dans l’éventualité de recours des tiers.

Mais pour la Délégation de Service Public (DSP) du Kaïna Beach, le marché est en place depuis des années et on a vraiment du mal à comprendre qu’il puisse y avoir une technicité justifiant de faire appel à un AMO. C’est d’autant plus vrai qu’on aurait probablement pu trouver en mairie toutes les compétences juridiques nécessaires, sans avoir à débourser les honoraires du cabinet de conseil.

C’est pourtant le choix dispendieux fait par notre commune aux poches décidément toujours percées…

Et lorsque le coup fourré est arrivé (c’est d’ailleurs à croire qu’ils l'attendaient...) et que la commune s’est fait retoquer au tribunal des référés, ils ont logiquement ouvert le fameux parapluie en indiquant dans le journal Var Matin que la commune avait respecté en tout point les recommandations de l’AMO.


Extrait de l'article du 31 octobre 2024
(la commune 

Selon la commune, ce ne seraient donc « que des erreurs formelles » (irrégularités qui portent sur la forme Ndlr) alors qu'à la lecture des ordonnances rendues, on y voit plus de vices de fond que d'erreurs de forme...

Cette fois-ci, ce n'est pas un point commun avec « Côté Mer » mais avec le Centre Commercial du Nautisme puisque, dans cet autre dossier municipal chaotique, la commune s’était déchargée sur son maître d’œuvre de toutes les malfaçons et fausses factures relevées par la Chambre Régionale des Comptes, selon la bonne vieille technique du bouc émissaire (même si, juridiquement, cela ne la décharge absolument pas de ses responsabilités Ndlr).

Amateurisme ou favoritisme, telle est la question ?

Dans l’affaire « Côté Mer », l’implication personnelle du maire et de son chauffeur bénévole ne font absolument aucun doute.

En revanche, pour la société « Les Voiles d’Or » (le nouveau délégataire cavalairois retenu pour le Kaïna Beach), il ne nous semble à priori pas y avoir de rapport direct avec nos deux joyeux drilles, même si l'attribution de ce lot de plage nous semble... assez Cavalaire.

Au regard des conclusions implacables du Tribunal Administratif de Toulon, on espère vraiment que le Procureur de la République sera saisi de ce dossier pour délit de favoritisme ; celui d’incompétence crasse ne figurant malheureusement pas encore dans le code pénal.

Le Kaïna Beach a-t-il vraiment une chance de rouvrir ?

C’est en tout cas l'espoir qu'entretiennent Alex et Pierre, les co-gérants de la société SMDR qui ont bâti de leurs mains le Kaïna Beach. Peut-être est-ce aussi la raison pour laquelle ils n’ont pas encore engagé de procédure pour réclamer les indemnités auxquelles ils peuvent légitimement prétendre.

Car ils savent pertinemment qu’ils seraient alors forcément tricards lors de la future ré-attribution de cette DSP…

Pourtant la manière dont la municipalité a géré ce dossier devrait, en filigrane, leur faire comprendre que cela ne changera pas grand-chose pour eux et qu’ils ont au contraire plutôt intérêt à réclamer une indemnisation dès à présent.

Car cet été, le Kaïna Beach est resté fermé alors que la commune aura pu paréo plus pressé en passant un avenant d’un an avec l’ancien délégataire ; évitant ainsi une rupture de continuité de ce « service public de bains de mers » tout en ramenant 80 000 € de loyer annuel dans les caisses de la commune.

Mais après la rouste prise au tribunal des référés et la volée de bois vert reçue en conseil d’Etat, la commune a certainement mis un point d’honneur à laisser l’établissement fermé ; essayant tant bien que mal de faire oublier leur cuisant échec.

Encore un point commun avec un autre dossier hyérois, puisque la boulangerie Pastor avait obtenu du Tribunal Administratif le versement d'avances sur indemnisation (dans le cadre des travaux de requalification de l'avenue Gambetta Ndlr) avant que la commune revancharde ne fasse appel de cette décision ; les condamnant irrévocablement à la fermeture (lire ici). 

Au Kaïna Beach, on constate que la commune traîne d'ailleurs toujours les pieds pour le remboursement des 30 000 € de caution bancaire versés lors de la précédente délégation (2018-2024).

Concrètement, nous sommes en fin d’année 2024 et la ville d'Hyères n’a probablement déjà plus le temps matériel pour lancer une nouvelle procédure administrative d’ici l’été 2025.

En toute logique, la plage restera donc déserte pour la deuxième année consécutive ; sonnant ainsi définitivement le glas du Kaïna Beach, balayé par l’ourag(ir)an « Jean-Pierre ».

Une facture salée pour le contribuable

A ce stade, la commune a déjà été condamnée à régler 4500 € à la société SMDR (1500 € en première instance et 3000 € devant le Conseil d’Etat).

Si on ajoute à la louche 10 000 à 11 000 € d’honoraires d’avocats (sachant que la commune n’a pas lésiné sur les moyens puisqu'elle a pris le nec plus ultra des avocats au Conseil d’Etat pour la représenter devant la plus haute juridiction administrative), on arrive déjà aux bas mots à 15 000 €.

Mais l’addition du Kaïna Beach risque d’être encore beaucoup plus salée pour le contribuable puisque la société SMDR peut légitimement réclamer au titre de la perte d’exploitation le montant prévisionnel de son bénéfice net avant imposition, soit environ 900 000 € sur les 6 années d'exploitation.

Allez, pour ce prix là, on vous fait bien volontiers cadeau des honoraires de l’Assistant de Maîtrise d’Ouvrage !!!

Une gestion municipale exemplaire ?

Jean-Pierre GIRAN ne manque jamais une occasion de s'auto-congratuler de sa gestion municipale remarquable.

Pourtant, du Centre Commercial du Nautisme au Kaïna Beach en passant par l’Espace 3000, les exemples de gabegies d’argent public et de mauvaise gestion administrative se multiplient partout dans la commune et contrastent évidemment avec l’autosatisfecit de notre édile plus que jamais déconnecté des réalités locales.

Lors des prochaines élections municipales, il est fort probable que le Kaïna Beach soit un petit grain de sable dans la mécanique bien huilée du candidat GIRAN.

Car ce dossier est une parfaite démonstration du système actuellement mis en place par l'édile : si tu veux faire du business à Hyères, il vaut mieux être du « Côté Maire »…




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