Zone Agricole Protégée : le maire ZAP les étapes ?
Le 2 avril dernier, à Hyères, le conseil municipal a littéralement viré à la scène de ménage entre l'élue d'opposition Karine TROPINI et le maire Jean-Pierre GIRAN.
Cette fois-ci, leur querelle portait sur le projet de ZAP - Zone Agricole Protégée - et sur la manière dont les agriculteurs avaient été (ou pas) consultés.
Selon le rapport transmis aux élus, un questionnaire a bien été distribué aux 301 exploitants agricoles hyérois, mais il n'a incontestablement pas eu beaucoup de succès... En effet, avec seulement 76 réponses (dont 30 favorables, 36 opposées et 10 indécises), l'élue du groupe « Hyères Tout Naturellement » ne manquait pas de reprocher à notre édile la mollesse de la concertation, la tiédeur du rapport.
Soit seulement 10% d'avis favorables ! Finalement, avec le recul, on n'était pas si mal lotis que ça à Michelet avec 14,5% de votes favorables pour le maintien des élèves dans l'école (lire ici).
A peine les chiffres de la future ZAP posés, la température monta d'un cran, torride, les piques fusèrent : l'une s'appuyant sur le rapport fourni pour affirmer qu'il n'y avait eu que deux réunions de concertation, tandis que l'autre, bombant le torse (poilu), n'en démord pas ; assurant qu'il en avait bien eu quatre, oui parfaitement, quatre Madame, dont deux publiques à l'hôtel de ville et dans les locaux de la Mutuelle Sociale Agricole (MSA).
Bon, ben, c'est sur, lui répond l'élue d’opposition de manière cinglante, si c'est des réunions privées !
On n'en saura pas plus ce jour-là sur ces deux réunions « non publiques » mais, une chose est certaine, les esprits se sont une nouvelle fois échauffés en conseil municipal au sujet de la ZAP.
En guise de préliminaire, Karine TROPINI titillait déjà le maire en l'accusant d’ « affichage politique », c'est à dire de vouloir se refaire une virginité champêtre avec des années de bétonnage effréné. Car, selon elle, cette ZAP, annoncée comme la plus importante du département avec 2500 hectares protégés (Sauvebonne, Borrels, Porquerolles), ne protège absolument pas de la spéculation immobilière puisque ces terrains sont déjà en zone inondable donc forcément inconstructibles.
Mais ce qui aurait du rester une simple joute verbale, dérapa alors en un instant en une tirade théâtrale à faire pâlir Molière et rougir Feydeau.
Car, à force de jouer les provocatrices, il arriva ce qui devait arriver : Jean-Pierre GIRAN ne put se retenir davantage et sortit une nouvelle fois de ses gonds ; lâchant alors sans crier gare cette réplique lunaire et d'un sexisme d'un autre siècle : « Non mais Madame, vous couchez pas avec moi ! ».
Comme toujours, silence gêné dans l'assemblée, certains toussotent, d'autres détournent les yeux.
Le bras de l'élue d'opposition, lui, ne tremble pas. Elle riposte immédiatement en lui assenant le coup de grâce : « Oh, Dieu merci. Je mérite mieux quand même ! ».
Réplique finale qui claque comme une gifle. Rideau. La virilité bravache du maire rentre aussitôt dans sa coquille.
Clap de fin pour ce grand moment de théâtre municipal, flirtant malheureusement une nouvelle fois avec le vaudeville de bas étage.
Agressée verbalement, Karine TROPINI rejoint ainsi la longue liste des élues – Chantal PORTUESE, Isabelle MONFORT, Véronique BERNARDINI et Edith AUDIBERT – qui ont eu maille à partir avec celui qui, en tant que premier magistrat de la commune, est pourtant garant de l'ordre républicain.
Avec Véronique BERNARDINI, Karine TROPINI a d'ailleurs fondé le groupe « Hyères Ensemble » — un nom qui, vu les circonstances, aurait pu se décliner en « Hyères – on couche pas – Ensemble », sorte de variante locale du mouvement « MeToo ».
Reste encore à convaincre Chantal PORTUESE et Isabelle MONFORT de les rejoindre, même si pour l'une d'entre elle ce n'est pas gagné, vu qu'elle recommence à faire les yeux doux au patriarche; caressant peut-être secrètement l'espoir d'être sa pierre philosophale ? Quant à Edith AUDIBERT, retraitée de la vie politique, elle pourra malgré tout suivre le combat par procuration puisque son fils Grégory, ancien directeur de cabinet de GIRAN, est pressenti pour redevenir celui de BERNARDINI en cas de victoire.
Ah, la politique hyéroise, un vrai feuilleton !
Mais revenons à nos moutons (du conseil municipal).
Qu'a-t-il encore bien bien pu passer dans l'esprit bouillant de notre édile volcanique ?
Pour nous, la seule explication est que notre roi du syllogisme a été victime d'un court-circuit mental : dans son esprit surchauffé, l'expression populaire « on n'a pas élevé les cochons ensemble » a probablement rapidement dérivé vers « on n'a pas fait les cochons ensemble » avant de finalement déboucher sur ce tout aussi surprenant « on n'a pas couché ensemble ».
Fort heureusement, l'édile s'est alors ressaisi et, comprenant qu'il avait une nouvelle fois poussé le cochonnet un peu trop loin, tenta de rattraper sa bourde par une pirouette : « mais il m'arrive de rencontrer des gens sans vous téléphoner ! ». Sans lui envoyer de selfies non plus ? Du moins, on l'espère...
Un projet nébuleux, une concertation tiédasse, des chiffres anormalement bas, une opposition systématiquement renvoyée dans ses jupons ? Passe encore, on commence à avoir l'habitude.
Mais des réunions « privées », des décisions visiblement prises à huis clos ou en passant par la case « oreiller », là on franchit un nouveau seuil d'opacité.
Iconoclaste devant l'Eternel, Jean-Pierre GIRAN rebat une nouvelle fois les cartes du jeu politique local et vient peut être même d'inventer un nouveau concept : après le secret d'Etat et le secret Défense, voici donc venu... le secret d'alcôve !
Avec le recul, quand on songe à ses 42 propositions faites en 2012 pour améliorer la démocratie locale, réjouissons nous que le président SARKOZY ne l'ait pas écouté car combien d'entre elles auraient fini par devenir indécentes ?
Aujourd'hui, si le maire souhaite réellement une ZAP à Hyères, reste à savoir s'il parle bien d'agriculture ou plutôt de son conseil municipal devenu au fil des ans une Zone d'Accrochage Permanent, de son mode de gouvernance frôlant souvent la Zone d'Abus de Pouvoir, ou bien, tout simplement, au vu de ses dernières envolées, une Zone d'Agitation Pubienne ?