Mars 2026 : Y a quoi au menu ?

Vingt heures pétantes au carillon : un quidam pousse la porte d' « à la bonne Soup'Hyères », gargote mondaine où les notables aiment venir se montrer, la cravate amidonnée, tout en se délectant de tambouille locale.

Ça faisait six piges qu'il n'avait pas remis le couvert ici. La dernière fois, il en était ressorti la gueule de travers, avec l'impression d'avoir bouffé son PEL.

Mais, bon, qui sait ? Des fois qu'ils auraient changé la carte...

À peine entré, c'est la douche froide : comme dirait Jaubert, la déco n'a pas bougé d'un poil de moustache. Toujours la même bouillabaisse : le même mobilier fané, les éternels habitués et, derrière les fourneaux, le même chef tyrannique, que les commis de cuisine ont fini par détester ; attendant tous maintenant patiemment que le « vieux » fasse un coup de chaud en plein service pour récupérer les clés du resto.

Le serveur rapplique, la mine en berne, carte à la main : « Navré Monsieur, le menu n’a pas beaucoup changé depuis votre dernière venue. On a tenté quelques revisites qui, je l’espère, vous conviendront ? ».

Le client s’installe... la chaise qui bringuebale et la nappe auréolée – mais certainement pas de gloire – lui collent aux coudes autant qu'au futal. La carte, elle, sent effectivement le rechauffé !

Le serveur (solennel) : « En entrée, le chef vous propose un dos de Cornileau. Auparavant il était servi avec des lentilles du Puy (du Fou) mais on le propose aujourd’hui nappé d’une purée de Ciotti, qui passe beaucoup mieux auprès de notre clientèle.

(Chuchotant, en aparté) : « En revanche, je vous déconseille le duo de saumon de l’ATLANtique. Qu'il soit servi à la sauce grisbi-che ou vignaronne, il n’est pas très frais. Même le chat n'en veut pas ».

Le plat du jour ? Du ragoût de Massuco, Monsieur, accompagné de ses gnocchis. Ça cale un régiment ! Un grand classique qu’on servait déjà en 2020, dans une version quasiment Seemuller (mais avec des macronis) relevé d'une sauce (grand) orientale, réalisée de main de Maitre !

Pour les végans : des (eynard) tomatis à la provençale, un plat bien de chez nous, accompagné de carottes Vichy.

Côté bar à pâtes, les Bernardini alla carboniza : une recette du grand chef gardéen avec de croustillants copeaux de Lard Républicain (LR) délicatement grillés au four avant investiture.

Le serveur (sur le ton de la confidence)« Comme Monsieur l'a sans doute remarqué, plus de pizzas au menu. Le pizzaïolo nous a quittés ; préférant aller travailler au Ristorante Politi, sur le boulevard du front de mer ».

Le client sourit, se remémorant effectivement qu'à l’heure où tous les anciens hommes politiques se lançaient dans l’humanitaire, l’ancien maire avait quant à lui préféré l’alimentaire.

Enfin, évidemment, notre plat signature : la daube maison, spécialité du chef dont la recette ancestrale vient  d'être légèrement modifiée pour s'adapter au goût du moment. Au fil du temps, la barbaque devenait en effet de plus en plus dure et il fallait la mâcher trois plombes – même après l'avoir laissée de longues heures au petit bain marie. Depuis janvier 2022, le chef la sert en effilochée pour que ce soit plus digeste et surtout plus facile à mâchouiller pour notre clientèle édentée. Nous la présentons sous forme d'(e)feuilletage, accompagné de pommes de terre en robe de chambre, ou bien sans rien, nature, si vous n’avez pas trop faim.

Au menu enfant, on propose en ce moment  du blanc de poulet de Noailles, servi en tajine. Et si vous aimez le gibier, il nous reste du service de midi encore un peu de râble de Lelièvre en croûte de sel des Pesquiers que le patron vous recommande vivement.

Pour le dessert : notre surprise du chef ! En fait, un assortiment de mignardises et de petites gâteries, selon l’humeur du moment.

Bon appétit, Monsieur !


Épilogue

Le repas terminé, en sortant, le client déçu soupire : « les plats sont décidément aussi insipides que l’addition est salée ».

Honteux et confus, il jura mais un peu tard qu’on ne l’y reprendrait plus… du moins, pas avant 6 ans !

À défaut de nouveaux plats de résistance à se mettre sous la dent, résigné, il s’est une nouvelle fois rabattu sur la sempiternelle daube du chef, le fameux plat signature de notre maître queue.

Mais comment pourrait-on le lui reprocher ?

En effet, si depuis 6 ans, les autres plats proposés à la carte avaient été plus appétissants, peut-être se serait-il plus facilement laissé tenter ?

Car en mars 2026, faute de grives, on mangera du mair(l)e...




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